La proposition de loi n° 654, déposée le 3 décembre 2024, vise à refonder le socle législatif de la profession infirmière. Son objectif principal est de mieux répondre aux besoins des patients sur tout le territoire et de moderniser l’exercice de ces professionnels essentiels au système de santé français
Les principales évolutions apportées par la loi
- Une refonte législative complète : la proposition vise à établir une base légale solide pour la profession infirmière, en remplaçant les décrets actuels par une loi spécifique. Cela permettra de sécuriser leur champ d’action et d’harmoniser leurs missions dans un cadre législatif clair.
- Un élargissement des compétences : les infirmiers pourront désormais accomplir de nouveaux actes médicaux, notamment la prescription de certains médicaments non soumis à prescription médicale, renforçant ainsi leur autonomie.
- Une reconnaissance accrue du rôle infirmier : la loi entend renforcer la place des infirmiers dans le parcours de soins, en valorisant leurs compétences et leur autonomie, afin de mieux répondre aux besoins des patients et des établissements de santé.
Conséquences attendues de l’adoption de la loi
- Amélioration de l’accès aux soins : grâce à l’extension des compétences des infirmiers, les patients bénéficieront d’une prise en charge plus rapide et efficace, notamment pour des soins courants.
- Allègement de la charge des médecins : en déléguant certains actes aux infirmiers, les médecins généralistes pourront se concentrer sur les cas plus complexes, ce qui optimisera le fonctionnement du système de santé.
- Valorisation de la profession infirmière : une reconnaissance législative accrue pourrait attirer davantage de vocations et renforcer la motivation des professionnels en exercice.
Adopté par l’Assemblée Nationale le 10 mars 2025, la proposition de loi n° 654 doit encore être examinée par le Sénat en première lecture et éventuellement faire l’objet d’une navette parlementaire avant sa promulgation.
Les nouvelles compétences des infirmiers : des exemples concrets
- Accès direct aux soins de premier recours : les infirmiers pourront intervenir directement auprès des patients sans prescription médicale préalable pour certains soins primaires.
Exemple : un patient présentant une plaie superficielle pourra consulter un infirmier pour le nettoyage et le pansement, sans passer par un médecin. - Création d’une consultation infirmière : les infirmiers seront autorisés à mener des consultations dédiées à la prévention, au suivi ou à l’éducation à la santé.
Exemple : un infirmier pourra organiser une consultation pour un patient diabétique afin de l’aider à gérer sa glycémie et à adopter de meilleures habitudes alimentaires. - Autorisation de prescription pour certains soins : les infirmiers pourront prescrire des dispositifs médicaux et des médicaments ne nécessitant pas d’ordonnance médicale.
Exemple : un infirmier pourra prescrire des pansements spécifiques pour le traitement d’un ulcère veineux.
Ces évolutions devraient particulièrement bénéficier aux zones sous-dotées en professionnels de santé, où l’accès aux médecins est limité.
Impacts sur la pratique infirmière
- Évolution de la nomenclature des actes à facturer : l’ajout de nouvelles compétences entraîne une révision de la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) afin d’intégrer ces nouveaux actes dans le cadre de la facturation.
Exemple : actuellement, la NGAP ne prévoit pas de tarification pour une consultation infirmière autonome. Avec la réforme, cet acte pourrait être codifié et facturable par les infirmiers. - Adaptation des outils de suivi des patients et de gestion des tournées : les logiciels de gestion des infirmiers libéraux devront évoluer pour inclure les nouvelles consultations et prescriptions dans leurs dossiers patients et leur planning de tournée.
Exemple : les infirmiers auront besoin d’un logiciel permettant d’enregistrer leurs prescriptions, leurs consultations et de mieux planifier leurs visites en fonction des nouveaux actes qu’ils peuvent accomplir. - Renforcement des exigences pour le suivi : l’accroissement de l’autonomie des infirmiers implique une responsabilité accrue en matière de traçabilité des actes et de formation continue.
Exemple : un infirmier prescrivant un dispositif médical devra assurer un suivi rigoureux dans le dossier du patient et être en mesure d’expliquer ses décisions.
Un lien direct avec le Ségur du numérique en santé
L’extension des compétences infirmières s’inscrit également dans une dynamique de modernisation du système de santé français, en lien avec le Ségur du numérique en santé. Ce programme vise à imposer l’utilisation de logiciels métiers conformes aux exigences réglementaires pour garantir une meilleure coordination des soins et une interopérabilité accrue entre professionnels de santé (source : esante.gouv.fr).
Avec l’élargissement de leurs responsabilités, les infirmiers devront utiliser des outils numériques conformes à ces nouvelles exigences, notamment pour :
- la traçabilité des actes réalisés (consultations, prescriptions, soins)
- le partage sécurisé des données de santé avec les autres professionnels du parcours de soins
- l’intégration des infirmiers dans les outils de coordination des soins numériques
Exemple : un infirmier réalisant une consultation autonome devra enregistrer les informations du patient dans un logiciel agréé Ségur, permettant ainsi un suivi optimisé et sécurisé par les autres professionnels de santé.
L’utilisation des logiciels conformes au Ségur du numérique représente un enjeu majeur pour les infirmiers libéraux et les structures de soins, nécessitant une mise à jour de leurs outils numériques et une adaptation à ces nouvelles exigences réglementaires.
Vers une efficacité accrue de notre système de santé
L’adoption de la loi n° 654 marque une transformation majeure de la profession infirmière en France. Elle améliore l’accès aux soins, soulage la charge des médecins et renforce la reconnaissance des infirmiers. Toutefois, elle implique également des adaptations importantes en matière de facturation, d’outils numériques et de responsabilités professionnelles.
En lien avec le Ségur du numérique en santé, cette réforme imposera également une modernisation des logiciels métiers utilisés par les infirmiers, afin de garantir une coordination efficace des soins et un partage sécurisé des données de santé.
Cette réforme constitue donc une avancée significative vers une organisation plus efficiente et plus moderne du système de soins, intégrant pleinement les infirmiers dans un cadre législatif et numérique en constante évolution.