Biométrique ou pas, la carte Vitale est une fierté française qui doit être actualisée
L’amendement voté par le Sénat et validé par le gouvernement pour consacrer un budget d’étude de 20 millions d’Euros pour une carte Vitale biométrique a suscité de très nombreuses réactions de la part des représentants des professionnels de santé libéraux, d’experts et d’agences rattachées aux administrations concernées.
En effet, ce projet de carte Vitale biométrique vient bousculer une feuille de route du numérique en santé en phase de déploiement, mais fait l’impasse sur certaines préoccupations légitimes de nos représentants au Sénat et à l’Assemblée Nationale telles que la fraude sociale comme le souligne Patrick Hertzel dans le diagnostic de la Commission des Affaires Sociales de l’Assemble Nationale (25 novembre 2020) : « La fraude aux cartes Vitale, si elle est éminemment symbolique, participe d’un vaste ensemble de pratiques illicites ou illégales qui contribuent à miner la confiance de nos concitoyens dans l’équité de notre système de santé ».
Carte Vitale biométrique : un projet complexe à mettre en place pour des bénéfices mal cernés
Il est difficile de justifier l’ajout d’éléments biométriques sur une carte Vitale, à l’instar de ce qui a été fait pour le passeport électronique ou la nouvelle carte d’identité, tant la mise en œuvre de la vérification pratique de l’identité du titulaire parait délicate : Il faudrait que le médecin vérifie d’abord les empreintes digitales de son patient avant de passer aux soins. Est-ce un scénario envisageable en France ?
Nous pensons que des évolutions très limitées de la loi permettront d’obtenir des résultats immédiats.
Voici trois propositions que nous livrons au débat sur le sujet :
Proposition #1 : rendre l’actualisation de la carte Vitale obligatoire et systématique à chaque passage chez un professionnel de santé.
La Cour de Comptes, tout comme l’Assurance Maladie, recommande d’aller systématiquement chercher les droits à jour sur les bases de données de l’Assurance Maladie pour pouvoir établir la juste répartition des charges entre l’Assurance Maladie obligatoire, la complémentaire et l’assuré. Il serait très simple d’ajouter systématiquement l’actualisation de la carte. Véritable service public, toute l’infrastructure d’actualisation des cartes Vitale existe déjà et est déjà financée. Le coût de mise en œuvre de cette proposition est marginal et pourra être absorbé par les opérateurs des services d’actualisation (NB : Olaqin fait partie de ces opérateurs et a réalisé l’actualisation de 37 millions de cartes Vitale en 2021).
Proposition #2 : instaurer des droits rechargeables dans les cartes Vitale.
Dans ce cas, que l’on peut voir comme une variante de la première proposition, la durée de vie illimitée de la carte Vitale ne sera plus une faiblesse puisque c’est la fraîcheur des informations contenues, avec une durée de validité limitée, qui permettra la prise en charge des soins.
Cette proposition demandera une évolution des logiciels des professionnels de santé qui pourra être introduite dans le pack Ségur, avec, là aussi, des coûts que l’industrie saura absorber.
Proposition #3 : interdire le tiers-payant et ne pas garantir la prise en charge des soins si la carte Vitale n’a pas été actualisée au cours des trois derniers mois.
Cette disposition simple permettra à un professionnel de santé de ne pas pratiquer le tiers-payant quand il est face à un patient qu’il ne connait pas et qui présente une carte Vitale n’ayant pas été actualisée récemment. Les fraudeurs (et les cartes utilisées) seront dès lors très faciles à identifier et à recenser dans la liste d’opposition.
Cette proposition devra en revanche faire l’objet de discussions avec les professions de santé pour que ce dispositif ne complique pas l’accès aux soins des personnes en difficulté. Bien travaillées, ces dispositions pourraient même contribuer à renforcer la confiance des professionnels de santé et ouvrir plus largement le tiers-payant intégral, ce qui sera bienvenue dans cette période difficile pour le pouvoir d’achat des Français.
A nouveau, nous louons la démarche des sénateurs et des députés qui confirment l’importance de la carte Vitale et souhaitent la faire évoluer et la pérenniser, pour que cette technologie française continue à sécuriser la juste prise en charge des soins. Il existe toute une filière avec de grands acteurs et de plus petites sociétés qui ont, pour le plus grand bénéfice des institutions, démontré leur capacité à accompagner les grands programmes de dématérialisation des processus administratifs de la santé, et qui sont volontaires pour continuer à le faire.